RésistanceS | Observatoire belge de l'extrême droite | Première
version de cet article publiée le : 5
juillet 2015 | Réactualisation, revue et allongée : 21 août
2015.
CHRONIQUE JUDICIAIRE - La
victoire contre l'avocat Marc Levaux,
obtenue il y a quelques jours devant la cour d'appel de Bruxelles,
rappelle une autre affaire judiciaire. A la fin des années nonante,
l'ancien vice-président d'AGIR (extrême droite wallonne) avait
tenté de faire condamner, lors de deux procès, Manuel Abramowicz.
Sans succès.
Après
à la publication d'un livre collectif européen sur l'extrême
droite en Europe, publié par les éditions Luc Pire (1),
dont le chapitre sur la Belgique a été écrit par Manuel
Abramowicz, une plainte est déposée, en 1997, contre lui pour
diffamation par un certain Hubert Defourny. Mais qui donc était ce
dernier ?
AGIR,
FNB, groupe « L'Assaut »... REF
Ancien
membre de la gendarmerie royale, celui-ci est ensuite passé, après
quelques ennuis internes survenus à la fin des années quatre-vingt,
avec armes et bagages dans les rangs de l'extrême droite la plus
radicale. Il rejoint d'abord
le « front wallon » AGIR, alors concurrent direct du
Front national (FN) du docteur Daniel Féret. Comme le FN, AGIR a lui
aussi plusieurs élus. Hubert Defourny en deviendra le
vice-président. Mais, souhaitant être le « calife à la place
du calife », il fait vite dissidence pour fonder son propre
groupuscule. Il prend le nom de « mouvement Référendum »,
plus connu par ses trois premières lettres : REF.
Le
rapprochement avec REX, le parti d'extrême droite catholique de Léon
Degrelle actif dans les années trente, est rapidement fait. Le
« Fondateur »
(sic) de REF est aussi lié au Front nouveau de Belgique (FNB) de la
députée fédérale Marguerite Bastien. Ancienne du parti libéral,
celle-ci était passée au FN en 1995, puis fit scission, après son
élection, pour fonder le FNB. Defourny et sa petite troupe
fréquentent également assidûment la mouvance du groupe néonazi
« L'Assaut » (officiellement dissout depuis 1993), mais
encore Bruxelles-Identité-Sécurité (BIS), la structure francophone
de l'époque du Vlaams Blok (le nom jusqu'en 2004 de l'actuel Vlaams
Belang) et des amicales d'anciens combattants belges SS du « Front
de l'Est ». Pensant sérieusement que REF allait devenir « le »
parti nationaliste le plus important, un proche d'Hubert Defourny, du
nom de Marc Levaux, écrira un petit livret admiratif, dont rien que
le titre démontre la mégalomanie de ces individus : « Ref,
l'espoir wallon ».
« Imagerie
de type socialo-maçonnique »
En
1999, avec un quarteron de « camarades de combat », il
est à l'initiative des « Etats généraux du nationalisme »
qui déboucheront ensuite sur la création d'une ASBL dénommée
« Mouvement pour la Nation », l'héritier du mouvement
Nation. Mais s'était sans compte sur la réapparition très rapide
des conflits internes endogènes à l'extrême droite francophone.
Defourny quittera donc, avec fracas, ce projet en accusant
copieusement de surcroit le mouvement Nation d'être sous l'influence
de « l’imagerie
de type socialo-maçonnique ».
Un crime de lèse-majesté dans ce milieu politique.
Au début
des années 2000, Hubert Defourny participera pour finir, avec
d'ex-AGIR et des « dissidents » du FN à la création du
Bloc Wallon (BW). Fondée avec le soutien du VB, cette nouvelle
formation électoraliste n'aura qu'une existence éphémère, comme
bien d'autres.
> Fête
néopaïenne et paramilitaire organisée, juin 1996, par le mouvement
REF d’Hubert Defourny (au fonds sur cette photo avec l’imperméable
beige). Le groupe néonazi l’Assaut d’Hervé Van Laethem
(deuxième à partir de l’extrême droite) y sera présent en masse
avec des futurs activistes de Nation ©
Photo : RésistanceS / RIDAF
Procès
contre Manuel Abramowicz
Retour
sur l'action judiciaire enclenchée en 1997 par Hubert Defourny
contre le coordinateur
de RésistanceS. S'estimant diffamé et victime de menaces suite à
la publication du livre publié aux éditions Luc Pire, il réclame
plus de 500.000 francs belges de l'époque (soit environ 12.500 euros
actuels) de dommages et intérêts à Manuel Abramowicz, auteur de
son chapitre sur la Belgique où une notice concernant le mouvement
REF figure. Pour enfoncer le clou encore plus profondément, le
leader néofasciste souhaite que le jugement, en cas de condamnation,
soit publié dans plusieurs journaux belges, aux frais bien entendu
de Manuel Abramowicz. Le leader d'extrême droite est persuadé d'y
parvenir. Son objectif est clairement de saigner financièrement le
journaliste antifasciste dans l'espoir de le faire taire
définitivement. Defourny veut aussi profiter de la médiatisation
de ce procès pour s'accaparer le leadership de l'extrême droite
wallonne et bruxelloise.
Un procès s'ouvre en 1997 devant la
chambre des référés de Bruxelles. Après des débats houleux,
Defourny est débouté de son action contre le coordinateur de
RésistanceS. Suite à sa défaite cuisante devant la Justice, il
décide cependant d'interjeter appel. Pour les mêmes motifs, un
second procès s'ouvre, en 1998, devant les référés d'appel. Comme
en première instance, Manuel Abramowicz gagnera également ce procès (2).
Depuis,
Defourny a totalement disparu du paysage de l'extrême droite belge.
Pour sa part, RésistanceS continue de combattre - par
l'information – cette dernière de façon efficace.
ANNE-LAURE
DE RYCK
RésistanceS | Observatoire belge de l'extrême droite
Revue de presse de ces deux procès gagnés
[Revue de presse non-exhaustive. Archives : RésistanceS / RIDAF]
Notes :
(1) Les extrémismes en Europe, rapport annuel 1996 du Centre de recherche et d'action sur le racisme et l'antisémitisme (CERA, Paris), coordonné par le politologue français Jean-Yves Camus, subventionné par la Commission européenne, chapitre sur la Belgique écrit par Manuel Abramowicz, éditions Luc Pire, Bruxelles et Paris, 1997.
(1) Les extrémismes en Europe, rapport annuel 1996 du Centre de recherche et d'action sur le racisme et l'antisémitisme (CERA, Paris), coordonné par le politologue français Jean-Yves Camus, subventionné par la Commission européenne, chapitre sur la Belgique écrit par Manuel Abramowicz, éditions Luc Pire, Bruxelles et Paris, 1997.
(2) « Hubert
Defourny débouté en appel », Alain Heyrendt, article, La
Libre Belgique, des 28 et 29 mars 1998.
© RésistanceS | RésistanceS-Infos.be | Bruxelles | 5 juillet 2015. Réactualisation : 14 août 2015 | RésistanceS est aussi sur FACEBOOK ICI